Apprendre les hiéroglyphes égyptiens
Dictionnaire des hiéroglyphes Ancien Egyptien
Hieroglyphs dictionay of Ancient Egyptian

CHAP 11... Peuplement et croissance agricole XIe-XIIIe siècle

 

Précédent Sommaire Suivant

 

   Le travail des paysans était prélevé jusqu'à 75% de la récolte. 20% vont pour la semaille de l'année suivante, 10% pour la dîme qui va de plus en plus au propriétaire de l'Eglise, 10% pour le loyer du sol, 20% pour la taxe personnelle et 35% pour les banalités. Bien qu'il existe des disparités régionales, la pression fiscale est à peu près uniforme : il faut tenir compte de la rentabilité des terres.
   La croissance agricole que connaît le monde occidental du XIe au XIIIe siècle se définit par deux mouvements : un essor démographique et un perfectionnement des techniques de travail (outillage). De plus, elle se greffe sur la mise en place de la seigneurie banale et châtelaine.
   On assiste alors à la naissance de villages nouveaux, autour d'un château issu des défrichements. Il faudra alors voir l'intégration du village dans le marché régional.

 

 

I] Les croissances rurales entre XIe et XIIIe siècle

   Il s'agit d'analyser les hommes, leurs liens avec le sol, leurs techniques et leurs outils. Il existe de nombreux rapports du point de vu des sources de l'existence d'une réelle croissance : les famines sont moins nombreuses. Pendant ces trois siècles, les problèmes de ravitaillement et les famines sont les moins présents de tout le Moyen-Age.

        
1) La croissance démographique
   Elle est indiscutable, mais particulièrement difficile à cerner dans les sources : on n'a pas de listes sérielles qui permettraient d'établir le nombre et l'évolution des habitants d'un village ou d'une région.
   La croissance la plus évidente est à chercher dans les terres nouvellement intégrées, comme l'espace germanique. D'une façon générale, entre 950 et 1300, on pense que la population a doublé, voir dans certaines régions triplé. Ensuite, ces résultats ne seront pas dépassés avant le XVIIIe siècle : on va vivre ainsi dans un monde plein par rapport aux capacités techniques.
   Le taux de croissance, pourtant, n'est pas extraordinaire : de 0,3% à 0,6%. Cela nous rappelle bien que l'on n'est pas dans une explosion brutale, mais continue dans la durée ; étalée dans le temps. Cette période de croissance est aidée par un optimum climatique : on note un retrait des glaciers et des lacs alpins ; certains cols alpins, et pas parmi les moins hauts, sont même traversés en toute saison. De même, autour du
Mt Blanc, on assiste à des migrations de bétail.
   Il est un aspect ou les historiens ne sont pas d'accord : la croissance démographique est-elle une cause ou une conséquence de la croissance agricole ? On peut voir une évolution parallèle entre les évolutions sociales : la croissance démographique, et économiques : la croissance agricole, autour des évolutions politiques : la seigneurie.

         2) La croissance agricole
   On peut discerner deux aspects à mettre en parallèles : la conquête de sols nouveaux par les défrichements, et une intensification des cultures dans les terroirs.

a. Les progrès de l'ager sur le saltus
   On constate la disparition de plus en plus grande des pâturages et des forêts : des gains en nouvelles terres de 10% à 15% s'observent dans les anciens territoires ; dans les nouveaux, ils peuvent atteindre les 30%.
   Les défrichements commencent dans la partie méditerranéenne (peut-être parce que c'est la région pour laquelle nous avons le plus de sources écrites ?). En
France, ils prennent leur apogée dans le milieu du XIIe siècle. Robert Fossier dans sa thèse sur la Picardie remarque qu'un document sur trois parle de défrichements. On repère dans ce processus trois axes chronologiques :
               Au Xe siècle, un élargissement des anciens terroirs : c'est l'essartage, la conquête de quelques terres sur les marges de finages préexistants. Il est diffus, en lisière du village. Il est fait individuellement, à l'insu du seigneur le plus souvent et par débroussaillage. L'initiative en revient ainsi aux paysans, individuellement et dans le cadre de la famille.
               Au cours de la deuxième moitié du XIe siècle : on assiste à une véritable colonisation avec la création spontanée ou concertée de villages neufs créés de toutes pièces. On en trouve beaucoup aujourd'hui dans les toponymes : ville-neuve, neuve-ville etc. Cette colonisation prend son apogée entre 1080 et 1130. L'initiative, cette fois, est due à la fois aux paysans et aux seigneurs, ce qui va modifier les cadres de la vie villageoise.
              
Au début du XIIIe siècle : Les grands espaces nouveaux ont tous été défrichés. On passe alors à une occupation intercalaire avec des maisons entre deux villages, formation typique jusqu'à l'époque moderne. On les remarque dans la toponymie par des noms de personnes (Albertville ?)

   Quelque soit le type de défrichement, les premiers sols ont été des zones lourdes et inondables, comme les polders ; puis les défrichements atteignent les terres les moins favorables comme les cols alpins. Finalement, se développeront des villages peux viables : on rentre dans le monde plein.

b. L'intensification des cultures
   Parallèlement aux défrichements, on note ce second aspect qui participe à la croissance agricole. L'intensification des cultures voit apparaître une polyculture aux côtés des céréales qui demeurent néanmoins primordiales.
   C'est ainsi qu'on dénote l'essor de la viticulture et de l'élevage. On commence aussi à utiliser l'assolement triennal, qui n'était pas encore généralisée. Les rendements ne cesse de s'améliorer indiscutablement. On y parvient non seulement grâce aux défrichements, mais aussi à l'amélioration de l'outillage.

        
3) Les améliorations techniques
   Apparaissent simultanément la maîtrise du fer, de l'énergie hydraulique, et de la force animale. Le fer est l'élément le plus évident de l'amélioration de l'outillage. Dès l'an 1000, les sources des péages témoignent de l'arrivée de matériaux en fer ; les animaux de traits sont ferrés, les charrues se voient dotées d'un soc en fer. On voit apparaître aussi dans les agglomérations au moins un forgeron, figure essentielle des communautés (il est riche et connu).
   La maîtrise de l'eau comme force motrice est liée à l'apparition du moulin. Ils existaient certes dans les
villae carolingiennes, mais ils se généralisent au XIe siècle, liés à l'essor de la seigneurie de ban : le seigneur contrôle les banalités. Les moulins à vent sont plus tardifs et apparaissent aux Pays-Bas à Arles. Ses moulins font gagner 10% à 20% (par rapport aux récoltes des paysans) au seigneur.
   Dans la meilleure utilisation de la force animale, il n'y a toujours pas d'invention technique, mais une diffusion généralisée des techniques de pointe : le passage des colliers de gorge au joug d'épaule. Egalement, on passe du bœuf à l'attelage de bœufs ou de chevaux. L'attelage devient fondamental : il définit la hiérarchie paysanne et intervient dans le paiement des redevances.
   L'animal et le fer sont partie prenante de l'évolution de l'araire vers la charrue : l'araire est un outil symétrique, dépourvu de déversoir, qui égratigne la terre ; la charrue est dissymétrique, pourvu d'un déversoir, qui pénètre la terre et la retourne.

 

II] Les transformations du peuplement

   On remarque trois aspects autour des deux protagonistes du village et de l'habitat : les seigneurs et les paysans.

        
1) L'essor des châteaux et "naissance du village"
   On entend que les paysans sont de plus en plus les hommes d'une seigneurie. C'est donc un rassemblement voulu et favorisé par leur seigneur qui précède l'apogée des défrichements. La chronologie atteste un lien étroit entre les mutations sociales et les mutations politiques. Le village naît au XIe - XIIe siècle (Robert Fossier), mais on ne nie pas l'existence, auparavant, de centres d'habitats ; on met en évidence les transformations de l'habitat.
   Ils sont désormais plus stables et plus structurés. Ils reçoivent un statut juridique avec des franchises et des chartres de peuplements, ce qui constituent les droits et les devoirs des habitants. Ils acquièrent ainsi un rôle comme centre d'un territoire par le biais d'un contrôle administratif. Ils acquièrent également une unité sociale, politique et économique autour d'une église paroissiale, ce qui renvoie à la mise en place définitive du réseau paroissiale qui recoupe finalement celui des communes.
   Mais, ce regroupement peu se faire aussi autour d'un château, d'une motte ou d'un donjon. Le château est fondamental dans cette restructuration. Définit le plus souvent par l'aspect militaire de la protection, il ne faut pas pour autant oublier que son essor est aussi lié au peuplement. Partout en occident méridional, il va rythmer le paysage et promouvoir la concentration de chevaliers-paysans. Ces derniers, d'ailleurs, attestent les liens structurels qui existent entre ville et châteaux. Il a été étudié au mieux par P. Toubert qui a analysé le phénomène dans le Latium de l'incastellamento (l'enchâtellement) : il s'agit de la concentration sur un site perché, à l'abri de fortifications de l'habitat villageois. Il se développe proche du château, dans un mouvement qui va de la plaine vers la colline. Ces villages portent un nom : le Castrum ; il désigne les châteaux, et avec, le village qui l'entoure.
   Cet habitat serré, perché et abrité par un château se définit par un finage en anneaux concentriques. Son développement dans le midi est caractérisé par la fondation de sauvetés : des églises fortifiées. L'essor de ces Castri est manifesté un peu partout.
   Au Nord de l'Europe, En Allemagne et Angleterre, le quadrillage châtelain se renouvelle peu, mais on remarque néanmoins ce lien entre la ville et le château. Ils prennent la forme de villages-rue.
   A mi-chemin, se trouvent les bourgs castraux : une paroisse et un château.

         2) Défrichements et renouveau du peuplement
a. La colonisation systématique
   Elle amène la création de nouveaux centres de peuplement. La physionomie politique des nouveaux habitants se différencie suivant les régions ; la physionomie sociale renvoie à la question : qui défrichent et que deviennent-ils ?
   Ce sont assurément les paysans qui défrichent, mais l'initiative en revient aux seigneurs, qui seuls disposent des hommes et de la terre ; les habitats nouveaux sont des villages seigneuriaux. Parfois même, des seigneurs se regroupent à plusieurs pour créer un village ; c'est le plus souvent le résultat d'un accord entre les deux types de seigneurs : celui qui donne la terre (le seigneur laïque) et celui qui donne l'argent et les hommes (le seigneur ecclésiastique). C'est un
accord de Pariage.
   Les colons sont des privilégiés : en effet, il faut bien que les paysans soient intéressés ! alors, on va leur offrir des avantages. Ils y gagnent une certaine liberté individuelle (ce ne sont pas des serfs) et collective (pas de taille due au seigneur de ban, ou prélèvement diminué). Ils reçoivent aussi des chartes de peuplement avec des franchises qui se développeront par l'effet boule de neige.

   Ces nouveaux espaces amènent les seigneurs à disposer de surplus économique par le biais du système de production seigneurial qui se fonde sur des prélèvements. Cela amène la question des réseaux d'échanges ruraux.

         3) Le désenclavement villageois : système seigneurial et échanges ruraux
   Le pouvoir au Moyen Age, c'est prélever et dépenser ; c'est la pratique du don. C'est ainsi grâce à la dépense seigneuriale que les activités artisanales vont pénétrer la campagne. La puissance se montre par une générosité ostentatoire et par la protection des marchés abrités dans le village seigneurial. Le seigneur est à la fois l'initiateur et le défenseur de l'économie villageoise.
   Ex : Au XIe siècle, en Catalogne, d'après
P. Banassier, les produits échangés suivent les proportions suivantes :
               44% de bétail, dont les 2/3 sont des chevaux de guerre : importance de la chevalerie pour les opérations militaires mais aussi pour définir le statut seigneurial. De plus, nous sommes dans la période de la Reconquista.
               23% de produits viviers
               12% d'outillages agricoles
               12% d'armes
               5% d'étoffes et de vêtements
               4% d'esclaves

   Ex : Au XIIe siècle, d'après le cartulaire de l'Artois, on recense 70 artisans de différents métiers. Qui sont-ils ?
               25 forgerons : importance primordiale du fer dans la vie artisanale et agricole.
               20 meuniers : renvoi à l'importance de la céréaliculture et de la seigneurie banale.
               11 charpentiers : existence d'un habitat en bois.
               6 maçons
               5 brasseurs
               4 boulangers
               1 boucher : importance faible de la nourriture carnée ? Il faut voir la consommation de ses propres bêtes aussi…

   On dénote l'importance des métiers de l'urbanisme, de la culture des céréales ; élevage et forêt ne sont plus considéré comme communs mais comme une prérogative royale avec l'essor des braconniers.

Texte établi à partir d'un cours de faculté en 1998-9
Grands Mercis au professeur

Précédent Sommaire Suivant


Mise à jour du : 25/04/99


cliohist.net ©