Apprendre les hiéroglyphes égyptiens
Dictionnaire des hiéroglyphes Ancien Egyptien
Hieroglyphs dictionay of Ancient Egyptian

CHAP 5... La fondation de la République (1870-1879)

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   La IIIe République va vivre un enracinement de la démocratie et des pratiques républicaines, avec une identification de la France à la République. C'est la force du patriotisme ; à ce moment là, l'idée de nation est la plus enracinée. Seulement, il a été très difficile de la mettre en place. La République ne va pas du tout de soi et elle soumet un paradoxe : une brillante réussite sur le long terme, mais une difficile mise en place. Au départ, les élus de la république étaient des royalistes ! La République n'a donc pas été fondée à partir d'un simple moule, dans sa construction, il y a tout un combat appuyé sur la scolarité.
   De plus, la IIIe République a vécu de graves oppositions : la contestation sociale sur sa gauche, la Grande Dépression qui change les repères, la montée de l'extrême droite et des affaires de corruption. Après la première guerre mondiale, elle réussit encore à surmonter les soubresauts de la révolution bolchevique. Par contre elle sera finalement ébranlée en 1929. Mais c'est une défaite extérieure qui la fait disparaître : Le maréchal Pétain qui la supprime à la suite de la défaite de 1940. Elle apparaît donc comme un régime fort d'espérance mais fragile par les difficultés à surmonter.
   La population peut connaître ses représentants : le personnage central est le député, élu dans une circonscription locale. Mais à l'origine ce scrutin à été proposé par la droite antirépublicaine pour favoriser les notables. Et les députés sont en contact avec le préfet et le sous-préfet qui représentent l'Etat. Le député est le représentant de l'arrondissement, des intérêts locaux. Cela explique que le député élu par les paysans va défendre une politique paysanne, d'où le maintien des structures. En retour le politique agit sur la société en permettant le maintient de la petite propriété et de la famille. Le député reçoit une indemnité parlementaire et devient un professionnel qui n'est plus un notable. Cela assure son indépendance.

   La IIIe République est un régime pacificateur : l'arbitre est le suffrage universel. La violence n'est plus guère dans les gestes, elle est monopolisée par l'Etat.

 

 

I] La défaite du Second Empire


      1) Défaite militaire et changement de régime
   On est habitué en France aux révolutions : 1830-1848. Le 4 septembre 1870 arrive la nouvelle de la défaite de l'empereur à Sédan le 1er septembre ou il avait lui-même pris le contrôle des opérations. C'est la catastrophe ! On se trouve face à une révolution atypique. Au lieu des pavés et des barricades, on assiste à une révolution spontanée : la foule se masse devant le corps législatif, et presse les soldats qui la laissent entrer. C'est comme si la troupe se dissolvait face à la défaite.
   C'est à ce moment que la gauche républicaine intervient avec Gambetta et Jules Favre. Ils se placent à la tête du mouvement et empêchent ainsi à l'extrême gauche de le faire. Ils forment aussitôt un gouvernement provisoire avec uniquement des gauches républicains et une exception : Rochefort classé extrême gauche.
   La révolution se fait sans violence, mais elle abat un régime très stable qui s'effondre tout seul. Pourtant Napoléon III venait d'organiser un plébiscite le 8 mai 1870. Le "oui" a été majoritaire et l'empereur bénéficiait d'un soutient populaire évident. Mais le bonapartisme a besoin de la victoire et quand les armées sont vaincues, avec elles son régime. Les classes dirigeantes pensent que rien ne peut arrêter la révolution, ce qui explique le manque de violence.
   Il y a donc un gouvernement provisoire composé de la gauche républicaine.

      2) Premières élections et victoire royaliste
   Le gouvernement provisoire installé, il y a toujours une position à prendre vis à vis de la guerre. Et on voit tour à tour différentes parties. Mais en 1870, les républicains appellent à la guerre dans la tradition nationale. Gambetta quitte Paris en ballon pour organiser à Tours le gouvernement provisoire. Mais ces armées improvisées ne peuvent grand chose face à la Prusse et alors on demande l'armistice. Ors Bismarck refuse de négocier avec ce même gouvernement provisoire : il ne veut traiter qu'avec un gouvernement légitime.
   Il faut donc organiser des élections le 8 février 1871. Les républicains sont pour la guerre, les royalistes pour la paix. Par conséquent, les royalistes emportent ces élections, les premières de la IIIe République (400 élus sur 645).
   Mais les
divisions chez les monarchistes sont telles qu'ils sont dans l'incapacité de mener une politique cohérente. Il y a les légitimistes, du côté de la famille régnante traditionnelle : les Bourbons. Ce sont des utopistes réactionnaires. Les légitimistes sont réunis autour du Comte de Chambord, le petit-fils de Charles X. Un deuxième courant : les orléanistes, partisans de la famille d'Orléans, celle de Louis-Philippe I. Ils sont regroupés autour du Comte de Paris. Il faudrait rajouter les bonapartistes qui sont alors peu nombreux, minés par la défaite.
   La droite monarchiste est donc majoritaire mais ne peut mener aucune politique. Elle porte à sa tête Thiers, vieux routier de la politique. C'est un ex-avocat marseillais qui a fait monter Charles X au trône. Il est nommé "chef du pouvoir exécutif de la République". La République est dès alors conçue comme provisoire. Et ce régime provisoire doit faire face à une situation difficile : le pays est envahi par les Prussiens qui mettent le siège devant Paris, alors que les royalistes ont été élus pour faire la paix et que les Parisiens sont exaspérés par le siège. L'assemblée nationale s'installe à Versailles et prend décision de supprimer la solde des gardes nationaux. On sent déjà une tension monter dans Paris qui subit le siège, à qui on coupe les vivres et qui a voté royalistes.

      3) La Commune
   Les Parisiens avaient acheté des canons. Seulement, le 18 mars 1871, le gouvernement fait rassembler les 227 canons pour les faire retirer par l'armée. Ces canons sont le symbole de la volonté parisienne de résistance. Alors des parisiens se pressent autour des canons pour empêcher leur prise par l'armée. Une partie de l'armée passe dans l'autre camp, des affrontements éclatent et deux généraux sont fusillés. C'est le début de l'affrontement entre Versailles et Paris. On va vers la radicalisation du conflit.
   Le gouvernement abandonne Paris. Il y a alors une situation de vide du pouvoir, rapidement comblé par la création de la commune. Après l'affaire des canons, des bourgeois parisiens ne voteront pas. Le conseil de la commune est donc formé des plus radicaux des républicains.
   Le conseil de la commune prend aussitôt des décisions symboliques : adoption du drapeaux bleu-blanc-rouge, proclamation de l'autonomie des provinces de France. De fait, ce conseil ne touchera pas à la propriété ; à l'or de la banque de France. Il y a un caractère spontané surgissant des événements, ce qui ne doit pas la mythifier.
   Thiers laisse faire, comme s'il abandonnait Paris. Il abat les communes de provinces en accord avec Bismarck, puis il reconstitue une armée ce que laissera faire l'Allemagne. Elle comptera 1300000 hommes et sera dirigée par Mac-Mahon.
Il s'en suit un second siège de
Paris, par les français cette fois, qui se termine par une sanglante répression en mai 1871. Il y aura 20 000 fusillés et des milliers de déportés. Ors cette répression ne se justifiait pas militairement et pose une question historique : pourquoi cette violence ? La coupure est profonde dans le pays.


   Les conséquences sont terriblement importantes :
            + La droite est obsédée par la peur de la révolution. Cette peur explique beaucoup de comportements.
            + Le mouvement socialiste est décapité par la répression. Il n'a plus de tête. Il faut raccrocher le monde ouvrier au monde intellectuel. Et cette liaison disparaît. Entre le syndicalisme et la politique, il y a un gouffre à la différence des pays du Nord. Il y a une cassure socialement préoccupante car elle empêche le dialogue entre ce qui se passe à la base et ce qui se passe aux sommets.
            + La République vient de montrer qu'elle pouvait faire couler le sang ouvrier.

   Voila qui bouleverse la donne politique. Les royalistes sont majoritaires et ils ont écrasé l'opposition dans le sang. Rien ne devrait s'opposer à leur programme : la Restauration.

 

 

II] L'impossible Restauration


      1) Entre légitimiste et orléanistes
   Sur le papier, la droite est ultra-majoritaire. Son programme est commun : restaurer la monarchie. Ors il y a deux problèmes :
           
+ Si les républicains radicaux et d'extrêmes gauches ont été liquidés, il reste les modérés de la bourgeoisie et moyenne bourgeoisie. Ils ont condamné la répression et sont toujours là.
            + Chez les monarchistes les uns veulent un retour au passé (légitimistes), d'autres sont moins optimistes (orléanistes). Mais ils ne manifestent pas tous par un attachement à leurs traditions. Et il se trouve que le comte de Chambord n'est pas très éclairé : il va manifester une obsession autour du drapeau blanc, alors que le drapeaux tricolore a dors et déjà été acquis.

   Par conséquent, l'unification entre les courants royalistes sera rendue impossible. Les orléanistes se disent qu'ils attendront que le comte de Chambord meurt. Et ainsi la République s'installe dans le provisoire. Et s'opère une convergence entre les modérés républicains et royalistes. Grévy, Ferry, Simon et Favre sont modérés, ouverts et veulent négocier. Gambetta lui-même est en train de s'assagir et défend une ligne politique conciliante.
   La guerre ne dure pas, et la paix calme les esprits. Les élections partielles du 2 juillet 1871 montrent un redressement très net de la gauche et surtout des radicaux. En 1873, Thiers obtient l'évacuation du territoire et paye les 5 milliards de francs d'indemnité de guerre très rapidement. Le Traité de Francfort de 1871 fait la paix, mais on perd l'Alsace et la Lorraine.
   Thiers conserve l'administration napoléonienne en lui insufflant du libéralisme. Et on réforme l'armée : loi Cissey. Elle organise le service militaire obligatoire selon un modèle particulier : Tirage au sort des conscrits. On est dans la perspective d'une construction nationale nette. Ainsi, un élément du folklore national s'impose : la conscription, le tirage au sort. C'est une situation politique souple : les royalistes opèrent des mesures modérées.
   Mais le provisoire dure. Alors il faut quand même se doter d'institutions. C'est cette souplesse du régime qui va permettre à cette République de durer en s'adaptant.

      2) De nouvelles structures républicaines "provisoire"
   Effectivement, il faut donner un chef à cette république. Alors on va appeler Thiers président de la République ; mais l'assemblée proteste. Thiers est mis en minorité par les légitimistes et il démissionne. Monte alors un légitimiste : Mac-Mahon. Le rôle du président de la République est conçu comme celui d'un roi provisoire. On y trouve des pouvoirs régaliens : droits de grâce, droit de signer des traités, initiative des lois avec les assemblées, il peut dissoudre l'assemblé nationale, il nomme les ministres.
   Mac-Mahon est un homme de principe. Il arrive au pouvoir et déclare : "avec l'aide de dieux et des nobles gens nous rétablirons l'ordre moral". Le message est clair. L'ordre moral est une conception de la société : la nation doit faire pénitence des crimes et excès de la commune. Cela se traduit par le Sacré-Cœur érigé pour expier les crimes de la commune.
   Voilà une façon rigide d'aborder la gestion du pays. L'opposition républicaine est mécontente et des signes d'impatiences sont visibles chez les orléanistes. Des catholiques modérés aussi pensent qu'il faut agir avec plus de souplesse.
   Mais Mac-Mahon veut que l'assemblée fasse un hommage au Sacré-Cœur, ce qu'elle refusera. Mac-Mahon pense qu'il faut être plus ferme. Il appuie la politique de son Premier ministre le duc de Broglie (à prononcer [breuil]). On interdit la commémoration du 14 juillet, les enterrements civils etc... Il y a un affrontement entre le gouvernement et la société.
   Aussi, comme il n'est pas possible de se mettre d'accord sur un roi, on fait durer les pouvoirs de Mac-Mahon en votant la loi du septennat pour prolonger les pouvoirs du président considéré comme provisoire. Et des signes montrent que la situation va durer : on crée le sénat pour faire contrepoids à une assemblée qui pourrait devenir républicaine et on applique un système d'élection compliqué par mode indirect pour que les sénateurs soit élus par des gens déjà élus : Les notables sont royalistes et le sénat doit pérenniser cet état de fait.
   Gambetta fait un pari politique. Il dit que la société se transforme et que bientôt les notables ne la contrôleront plus et que de nouvelles couches les remplaceront. Il appuie donc la création du sénat, œuvre royaliste...

 

 

III] La conquête de la république par les républicains.


      1) L'installation des républicains
   Les élections ont lieu au scrutin uninominal a deux tours. Pour les royalistes, ce type de scrutin doit favoriser les notables. Le système est donc verrouillé.
   Mais l'évolution à lieu : les élections du 5 mars 1876 donnent une majorité républicaine importante : 360 contre 170. La géographie est caractéristique. On voit s'opposer trois France :
            + Est et sud-ouest : une France des villes avec une industrie et un développement urbain c'est la France républicaine.
            + L'Ouest et le Nord-Ouest, nettement monarchiste jusqu'en 1986.
            + Il reste un petit noyau de tradition bonapartiste, très rural. Ce bonapartisme s'est transformé en radicalisme.
   La géographie est fonction de structures profondes. Il y a une stabilité séculaire du monde électorale.
   La France républicaine est la plus dynamique puisque correspondant au monde des villes. La victoire va donc être durable. Le pari de Gambetta se réalise dans l'assemblée. Viendra ensuite la conquête des communes et plus tard celle du sénat. Il faut faire la différence entre les phénomènes structurels et ponctuels !
   A partir de 1876, on va voir des victoires systématiques de la gauche républicaine jusqu'à une nouvelle fracture : la guerre de 1914-1918.
   Nous voyons donc les fruits de la politique de Gambetta mûrir.

      2) L'emprise républicaine
   Cette victoire républicaine se prolonge par l'application du programme de Belleville du 5 mai 1869. Et Gambetta déclare : "Le cléricalisme, voilà l'ennemi". Il prend le contre-pied de Mac-Mahon. La ligne directrice des républicains sera autour de ces phrases. L'anticléricalisme ne veut pas dire : contre la religion ; mais contre la mainmise de la religion sur la politique et la société. Ils touchent juste et vont mobiliser petit à petit et même les campagnes.
   Jules Simon est nommé Premier ministre par Mac-Mahon. Mais il est coincé par le président et Gambetta. Mac-Mahon renomme de Broglie minoritaire. On refait alors des élections après la dissolution de l'assemblée le 22 juin 1877 : Gambetta déclare : "il faudra se soumettre ou se démettre". Ce discours est entendu par le pays : Il y aura 80% de participation. Les républicains emportent 327 sièges et les monarchistes 207 en octobre 1877. Les orléanistes ne suivent plus Mac-Mahon.
   Mac-Mahon est face à une situation bizarre. Le président sous la IIIe République a en fait beaucoup de pouvoir, mais après Mac-Mahon, il ne l'utilisera plus. Mac-Mahon a perdu son pari : son parti a perdu les élections de 1876, il a dissout l'assemblée, et il a reperdu. Politiquement, il ne peut plus dissoudre. Désormais, la dissolution tombe en désuétude. La pratique des institutions est aussi importante que les institutions : il faut que l'opinion les accepte. Le président utilisera de moins en moins ces pouvoirs car l'origine de la présidence est marqué par l'épisode Mac-Mahon.
   La IIIe République sera non pas un régime présidentiel mais parlementaire, contrairement à la "constitution" (en fait, il n'y a pas de constitution)

      3) La victoire républicaine
   Le 30 janvier 1879, un nouveau président est élu : Jules Grévy. Le président est républicain, l'assemblée est républicaine, il faut donc affirmer des symboles : le drapeau tricolore, une fête nationale le 14 juillet 1790 : on commémore la commémoration, la fête de la fédération. Ces symboles sont acceptés par tous sauf les légitimistes. On choisit un chant : la Marseillaise, et on vote une loi d'amnistie pour ceux qui ont participé aux événements de la commune.
   Il s'agit d'un pari politique, un pari qui vise à regrouper un bloc historico-social, c'est une alliance entre les nouvelles couches (avocat, médecin, journaliste) avec les ouvriers et paysans attachés à leur indépendance. Le paysan veut être maître chez lui. Il faut donc un programme unificateur : le programme de Belleville de 1869. Et l'outil principal, c'est l'école (l'égalité devant l'avenir). Il faut d'abord parachever l'œuvre : des écoles primaires partout et un système de bourses. L'école doit être celle de la Nation : gratuite et laïque. Il faut également annoncer la liberté d'expression et d'association.

 

Texte établi à partir d'un cours de faculté suivi en 1997-8
Grands Merci au professeur

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Mise à jour du : 23/03/99


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