Polycrate, tyran de Samos

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   [39] (...) Les Lacédémoniens étaient en campagne contre Samos et Polycrate, fils d'Aïakès, qui s'était emparé de Samos par une révolte. II avait tout d'abord partagé l'Etat en trois parts et s'était associé ses frères Pantagnotos et Syloson ; puis, après avoir tué l'un d'eux et banni le plus jeune, Syloson, il était devenu le maître de l'île entière. A ce moment, il avait noué des relations d'hospitalité avec le roi d'Egypte Amasis, en échangeant avec lui des présents. Sa puissance s'accrut en peu de temps et fit parler d'elle en Ionie et dans le reste de la Grèce, car la fortune lui souriait partout où il portait ses armes. Il avait cent pentécontères et mille archers ; il attaquait et pillait indistinctement tout le monde, car il prétendait faire plus de plaisir à un ami en lui rendant ce qu'il lui avait enlevé que s'il ne lui avait rien pris pour commencer. Il avait conquis un bon nombre des îles et beaucoup des villes du continent ; il avait notamment vaincu sur mer et pris les forces entières des Lesbiens, qui s'étaient portées au secours de Milet, et il fit creuser par les captifs le fossé qui entoure les remparts de Samos.

   [46] Arrivés à Sparte, les Samiens chassés par Polycrate furent reçus par les magistrats de la ville et leur firent une longue harangue, en solliciteurs pressants. (...)

   [47] Les Lacédémoniens firent ensuite leurs préparatifs, et ils attaquèrent Samos, en reconnaissance, disent les Samiens, du secours que leur propre flotte leur avait précédemment apporté contre les Messéniens ; mais, aux dires des Lacédémoniens, ce fut moins pour donner à des Samiens l'aide qu'ils sollicitaient que pour venger le vol du cratère qu'ils envoyaient à Crésus et du corselet dont le roi d'Egypte Amasis leur avait fait présent. (...)

   [54] Donc les Lacédémoniens vinrent avec une flotte nombreuse et assiégèrent Samos. Ils montèrent à l'assaut des remparts et prirent pied sur la tour proche de la mer, mais Polycrate, venu en personne à la rescousse avec une troupe nombreuse, les en délogea. (...)

   [56] Arrivés au quarantième jour de siège sans avoir fait le moindre progrès, les Lacédémoniens s'en retournèrent dans le Péloponnèse. Une tradition répandue, mais sans valeur, veut que Polycrate ait fait frapper, en plomb recouvert ensuite d'or, un grand nombre de pièces de monnaie du pays pour les donner aux Lacédémoniens, moyennant quoi ceux-ci se seraient retirés (...)

Hérodote, Histoires, III.

 

   Crésus : roi du VIe siècle dans le royaume de Lydie qui couvrait la moitié est de la Turquie actuelle. Il est réputé très riche et l'était. Dans son royaume coulait un fleuve : le Pactole. Ce fleuve chargeait des paillettes d'or en quantité tel qu'il suffisait de se    baisser pour en ramasser. Crésus termine sa carrière vaincu par l'empire perse en 546.
  
Hérodote : la tradition en fait le père de l'histoire. On sait qu'il est né dans la cité d'Halicarnasse vers 480 et il est mort à Thourioi. Il appartient à une grande famille. Il a eut tors de faire de la politique est de choisir le mauvais camp. Il est exilé à Samos jusqu'en 455. Comme Strabon, il a été un grand voyageur et il a séjourné un bon moment à Athènes. On a conserver une œuvre complète : Enquête ou Histoire. C'est l'histoire du monde grec de 550 à 478 et il s'attarde particulièrement sur les guerres médiques. Thucydide prend consciemment la suite d'Hérode jusqu'en 411, suivi par Xénophon.

   Nous sommes à un moment de l'histoire de
Polycrates : il est opposé dans une guerre au spartiate. On est en 725.
Polycrates est le fils d'Aïakès.
Aïakès était un aristocrate qui pratiquait la piraterie pieusement ! En effet, il consacrait une partie du butin à sa divinité.

 

I] La prise de pouvoir


  
Polycrates prend le pouvoir par une révolte. Une autre source, celle de Polyen au IIe siècle après J.-C, avec les Stratagèmes nous apporte plus de détail. Polycrates prend le pouvoir lors d'une fête donnée à Héra, déesse de la cité, avec seulement quinze hoplites : cette fête rendue à Héra à la particularité que les hommes ne doivent pas s'armer.
   Si Polycrates a effectivement pris le pouvoir, il rencontre la résistance d'exilés vers
Sparte. C'est que de tradition, les Spartiates sont hostiles à la tyrannie et partisans de l'oligarchie. Les exilés sont donc des membres de l'aristocratie.
   Polycrates s'associent d'abord ses frères, car au départ il ne peut instaurer sa tyrannie seul. Ils s'associent donc les clients de ses frères, puis, la tyrannie installée, il s'en débarrasse.
   Dans l'antiquité, le tyran est celui qui prend le pouvoir par la force, et qui ensuite abuse ou non du pouvoir.

II] La politique étrangère du tyran


   Il noue des relations d'hospitalité avec le roi d'Egypte premièrement, mais ensuite il lui vole un cadeau qu'
Amasis envoie à Sparte.
   Plus loin, il fait la guerre aux
Lesbiens et au Milésiens. C'est que Polycrate a une politique extérieure de conquête. Au plus fort, il domine la Mer Egée Orientale ; son empire est une thalassocratie. De plus il fait des conquêtes terrestres, à savoir Millet.
Avec un tel empire, il faut avoir une diplomatie et une politique d'alliances pour s'opposer aux ennemis obligés. Il trouve donc hors de Grèce un soutien égyptien. Ors, par la suite, cette alliance est abandonnée. Après 550 arrive dans la région
l'empire perse qui balaye le royaume de Crésus. Les Grecs d'occident espèrent alors que l'empire de Polycrates serve de zone tampon.
   Seulement, Polycrates se fait l'allié des Perses plus proches, ennemi des égyptiens ; d'où la rupture de l'alliance. Il n'y a alors plus rien entre la Grèce d'occident et l'empire perse. Les Grecs vont alors faire la guerre contre Polycrates pour essayer de rétablir la zone tampon en mettant à la tête de l'empire de Polycrates un grec servant leurs intérêts.
   Cette alliance explique aussi pourquoi les spartiates ne peuvent pas prendre
Samos. Il y a bien le fossé, mais les hoplites spartiates sont trop forts pour ce laisser repousser par celui-ci. Mais aussi on peut penser que les Perses ont fait profiter de leur génie militaire et de la poliorcétique aux Samiens.

 

III] Polycrate, le tyran parfait ?


   Par la construction du fossé, on peut supposer que Polycrate a été un grand mécène ; il a aussi construit un aqueduc, des aménagements dans le sanctuaire de l'
Heraion. On peut donc en déduire qu'il n'a pas été un tyran ayant abusé de son pouvoir.
   Est-il alors un tyran parfait auquel tout réussit ? Polycrates ne se débarrasse pas des spartiates aussi facilement que l'on pourrait le croire : il a fallut les payer pour qu'il s'en aille. Ils ont donc été des adversaires difficiles à vaincre. Sa puissance ne serait donc pas aussi grande.
   Seconde faiblesse, il fait frapper des pièces en plomb recouvert d'or. Hérodote n'y croit pas. Mais ces pièces ont été retrouvées par l'archéologie. Ce type de monnaies fourrées est utilisé pour deux facteurs : tricher à la vente ou alors au travers d'une situation difficile. On peut dire qu'ici il s'agit de la seconde possibilité. En effet, dans un siège, le facteur temps est le plus important. Ors faire de fausse pièces de monnaies est plus difficile et donc plus longs que de frapper de véritables pièces. On peut aussi ajouter que l'emploi de l'or pour la frappe des pièces est anormal : le métal normalement utilisé est l'argent. En période de crise, on fabrique donc des pièces en plomb que l'on badigeonne de l'or provenant des statues divines préalablement fondues. On repérait les fausses pièces grâce à une pierre de touche.



Mise à jour du : 15/12/98